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"Les véritables auteurs de ce film sont les innombrables cameramen, preneurs de son, témoins et militants dont le travail s'oppose sans cesse à celui des pouvoirs qui nous voudraient sans mémoire".
Je ne vais pas ici faire une retrospective sur Chris Marker, puisque "Le fond de l'air est rouge" est le seul de ses films que j'ai vu. Je m'interesse uniquement ici à l'importance de ce film, envers quiconque est un minimum à gauche, et/ou s'intéresse un minimum au journalisme, à l'histoire contemporaine, aux mouvements révolutionnaires.
"Le fond de l'air est rouge" est un imposant retour sur 10 années de luttes rouges, de 1967 à 1977, de la Sorbonne au Viet-Nam en passant par le Chili. Au total, 3 bonnes heures d'un montage d'archives innombrables, venues d'un peu partout et de tout le monde. Images d'amateurs, journaux télévisés, propagande d'état, tout y passe.
A savoir: "Le fond..." est difficile à suivre. Il est d'abord rugueux, pratiquement sans commentaire off. Ensuite, beaucoup d'événements qui y sont dépeints nous sont souvent méconnus, et aujourd'hui lointains (les passages du Chili). Cependant, son grand intérêt est de nous interpeller sur l'utilisation que l'on peut avoir des archives. Marker mélange, parfois avec humour, des scènes tragiques de manifestations violentes avec leur opposé, le rendu réactionnaire des journaux télévisuels. Le générique de début vaut à lui seul le détour: il montre simultanément des images réelles avec la scène de l'escalier d'Odessa, dans le Cuirassé Potemkine, y trouvant des similitudes troublantes. On ne sait alors plus vraiment où commence la réalité.
Le fond nous ouvre les yeux sur certaines choses dérangeantes. Dans une interview de Fidel Castro où ce dernier déborde de charisme. Dans les images de mai 68 où la plupart des témoins se préoccupent surtout de l'état des routes. Dans cette scène d'introduction où un pilote de l'US en mission vante à quel point c'est "fabuleux" de tirer au napalm sur les Viet Cong. Apocalypse Now, mais en vrai.
Le générique de début du film. Avec commentaire de Simone Signoret, de mémoire.